Qu’est-ce que le système de contrôle de l’OIT ?
Les Normes internationales du Travail (NIT) adoptées par l’OIT s’appuient sur un système de contrôle afin de superviser et de promouvoir la bonne application des conventions ratifiées par les États membres. Le contrôle des NIT comprend une évaluation juridique, un examen tripartite et, le cas échéant, un contact direct et un soutien technique aux États membres, partant du fait que le dialogue, les encouragements, les conseils et l’assistance permettront d’arriver à une meilleure application.
Les employeurs jouent un rôle primordial en fournissant des informations de première main pour l’évaluation juridique et la rectification des cas de non-respect. Les procédures régulières de surveillance de l’OIT réalisées par la Commission d’experts pour l’application des conventions et des recommandations (CEACR) sont au cœur de ce processus. Il s’agit d’un groupe de 20 experts du monde entier, mandatés pour fournir une évaluation impartiale et technique non-contraignante sur l’application des Normes internationales du Travail. Pour ce faire, les experts examinent les rapports présentés par les gouvernements à l’OIT sur les mesures prises, en droit et en pratique, pour appliquer les conventions ratifiées, ainsi que les commentaires des organisations d’employeurs et de travailleurs sur lesdits rapports, ou sur la mise en œuvre d’une convention déterminée. La CEACR émet des observations (commentaires à caractère technique) sur l’application d’une convention donnée ou des demandes directes qui visent à obtenir des éclaircissements ou des précisions. Ces observations adressées aux gouvernements sont publiées annuellement dans un rapport qui paraît en février/mars et qui constitue une base de discussion pour la Conférence internationale du Travail (CIT) de l’année suivante. La Commission tripartite de l’application des Normes (CAN) est nommée chaque année par la CIT afin de contrôler, sur une base tripartite, l’application des normes de l’OIT. Son travail se base sur les rapports de la CEACR et il comporte l’élaboration d’une liste de cas nationaux individuels que les mandants de l’OIT devront examiner. Le gouvernement concerné est invité à répondre verbalement devant les autres États membres, les employeurs et les travailleurs, qui interviennent dans le débat de la CAN. La CAN formule très souvent des conclusions invitant les gouvernements à prendre des mesures précises pour apporter une solution à un problème ou à accepter des missions ou l'assistance technique du BIT. Les débats et les conclusions sont publiés dans le rapport de la CAN. Les cas particulièrement préoccupants sont mis en évidence dans son rapport général.
En plus de la CEACR et de la CAN, chaque organisation d’employeurs et/ou de travailleurs peut introduire une réclamation en vertu de l’Article 24 de la Constitution de l’OIT auprès du Conseil d’administration (CA) contre un État membre qui aurait manqué d'appliquer une convention ratifiée. Le CA peut alors établir un comité tripartite pour examiner la réclamation et la réponse du gouvernement. Le comité soumet alors un rapport au CA reprenant les aspects juridiques et pratiques du cas en question, ainsi que les conclusions et les recommandations. Si la réponse du gouvernement n’est pas jugée satisfaisante, le CA peut publier la réclamation et la réponse. En outre, au titre de l’Article 26 de la constitution de l’OIT, tout État membre de l’OIT ayant ratifié une convention donnée, ou un délégué de la CIT/CA, peut déposer une plainte contre un État membre pour non-respect d’une convention que les deux États ont ratifiée. Le CA peut alors nommer une commission d’enquête afin de procéder à un examen approfondi et formuler des recommandations pour résoudre les problèmes soulevés. Si ces recommandations ne sont pas acceptées, la Cour internationale de Justice (CIJ) peut être saisie. Lorsqu’un gouvernement refuse de donner suite aux recommandations d'une commission d'enquête ou de la CIJ, le Conseil d'administration peut renvoyer l’affaire à la CIT. La Commission d’enquête est le plus haut niveau d'investigation de l’OIT ; elle est généralement constituée lorsqu'un État membre est accusé de violations graves et répétées et qu'il a refusé à plusieurs reprises d'y remédier.
Les organisations de travailleurs et d’employeurs peuvent déposer une plainte au Comité de la liberté syndicale (CLS) du CA contre des États membres pour violation des principes de la liberté syndicale, tels qu’énoncés dans la Constitution de l’OIT, même si l’État en question n’a pas ratifié lesdites conventions (conventions n° 87 et n° 98, par exemple). Le CLS est composé d’un président indépendant et de trois représentants des gouvernements, trois représentants des employeurs et trois représentants des travailleurs. S’il estime la plainte recevable, après avoir clarifié les faits avec le gouvernement, il soumet un rapport au CA reprenant ses conclusions et recommandations d’action au CA. Les gouvernements sont ensuite invités à rendre compte de la mise en œuvre de ces recommandations. Si le pays a ratifié les instruments pertinents, la commission d’experts peut être saisie des aspects législatifs. Le CLS peut également choisir de proposer une procédure de "contacts directs" au gouvernement concerné de façon à traiter le problème directement avec les responsables gouvernementaux et les partenaires sociaux par le biais du dialogue.
En quoi le système de contrôle de l’OIT intéresse-t-il les entreprises ?
Ce système de contrôle tend à influencer l’action des gouvernements vers une bonne application des conventions ratifiées. Tout comme les commentaires de la CEACR, les conclusions de la CAN et les recommandations qui découlent d’une des procédures spéciales de contrôle s’adressent directement aux gouvernements ; l’importance immédiate pour l’entreprise en est parfois sous-estimée, cependant il est important de garder à l’esprit que :
- Les normes internationales du travail sont mises en œuvre par le biais des législations nationales qui peuvent affecter directement les entreprises. Les employeurs doivent jouer un rôle crucial dans l’élaboration et la mise en œuvre des réglementations nationales en conformité avec les conventions de l’OIT ayant été ratifiées.
- Le contrôle effectué par la CEACR se base sur la collecte d’informations pertinentes provenant des rapports des gouvernements et des commentaires des organisations de travailleurs et d’employeurs. Il est indispensable que les organisations d’employeurs expriment les perspectives de l’entreprise au BIT, afin que l’information soit la plus complète et équilibrée possible. La participation des employeurs peut par exemple donner lieu à des recommandations pour amender la législation nationale qui concerne l’entreprise ou aider à neutraliser des commentaires provenant des syndicats.
- La réunion de la CAN est le principal pilier du système de contrôle où les employeurs, ainsi que les gouvernements et les travailleurs font une évaluation technique et politique de l’application des normes du BIT. Au sein de la CAN les employeurs peuvent dénoncer publiquement des abus présumés et critiquer des politiques nationales non satisfaisantes. L’attention qui est ainsi attirée sur des gouvernements qui persistent à ignorer leurs obligations vis-à-vis de l’OIT entraine une pression publique. La participation des employeurs, notamment dans la rédaction des conclusions, revêt par conséquent une grande importance.
- Les procédures de réclamation et de plainte représentent pour les organisations d’employeurs l’occasion d’attirer l’attention du CA sur les manquements de certains États membres à appliquer une convention ratifiée. Une réclamation est déposée en vue d’obtenir une recommandation tripartite pour résoudre cette situation spécifique de non-respect. La commission d’enquête établie suite à une plainte procède à une première enquête sur les violations présumées et elle est perçue comme un signal d’alarme indiquant des situations extrêmement graves qui peuvent affecter le monde de l’entreprise.
- Par le biais de la procédure mise en place par le CLS, les organisations d’employeurs peuvent dénoncer les attitudes de certains gouvernements et des lois qui sont hostiles aux employeurs, qui violent leur liberté d’association ou leurs droits en tant qu’organisations représentatives. En outre, un nombre croissant de plaintes sont déposées auprès du CLS par des syndicats ayant la ferme intention d’attaquer ou de discréditer des entreprises publiques ou privées (nommer et stigmatiser). Dans un tel scenario, l’intérêt des organisations d’employeurs à exposer leurs points de vue au CLS est d’autant plus grand, surtout si le nom de la société est mentionné.
Quelle est la position de l’OIE concernant le système de contrôle de l’OIT ?
Les NIT sont importantes pour instaurer un environnement approprié aux entreprises et à la situation sociale dans un contexte international. Un système de contrôle crédible, équilibré et performant, qui tienne compte des besoins des entreprises durables, est essentiel car il guidera également les États membres de l’OIT dans leurs efforts de mise en œuvre. L’OIE reconnaît la précieuse contribution des mécanismes de contrôle pour résoudre des questions critiques en matière de relations professionnelles et de droits sociaux fondamentaux. L’OIE vise à atteindre un système de NIT qui soit transparent, réaliste, équilibré et crédible et qui tienne compte de la diversité des cadres juridiques, des évolutions et des contextes au niveau social, économique et technologique ainsi que des besoins des entreprises durables.
L’OIE travaille de manière incessante afin de remédier au manque important d’efficacité des mécanismes de contrôle de l’OIT et elle continue d’œuvrer pour influencer le système de l’OIT sur des questions qui sont essentielles pour les entreprises durables.
Comment l'action de l’OIE sur le système de contrôle de l’OIT fait-elle progresser le programme pour les entreprises ?
Grâce à son statut consultatif au sein de l’OIT, l’OIE y joue un rôle clé :
- En assistant et en encourageant les fédérations membres à contribuer aux mécanismes de contrôle, en élaborant des commentaires sur l’application en droit et en pratique de conventions ratifiées, en préparant et en orientant des interventions pendant la CAN, y compris la négociation de conclusions, en rédigeant des plaintes et des réclamations, des plaintes sur la liberté syndicale, en présentant des commentaires/plaintes au nom des membres, ou conjointement avec eux ;
- En s’engageant au niveau du CA et avec le Bureau de l’OIT pour améliorer le fonctionnement et les méthodes de travail des organes de contrôle pour les rendre transparents, efficaces et pertinents pour les besoins actuels des entreprises durables.
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